Article rédigé par l’équipe des Ateliers de découverte urbaine.
En ville, la présence d’immeubles anciens est appréciée car ils ont du cachet et donne une âme à des quartiers. Encore faut-il qu’ils soient en bon état et adaptés aux besoins actuels. C’est que ce nous allons voir pour les immeubles de logement.
Nous vous dévoilerons ensuite comment Euroméditerranée intervient pour préserver l’habitat ancien sur les quartiers de la Joliette et de la Porte d’Aix.
L'entretien des bâtiments anciens
Pour rester en bon état au fil des années, les bâtiments doivent être entretenus régulièrement par leurs propriétaires.
Ces derniers peuvent les transformer pour les adapter à :
- l’évolution de la composition des ménages : développement du nombre de familles monoparentales et des personnes vivant seules (étudiants, célibataires, personnes âgées) orientant la demande vers des logements plus petits…
- l’évolution des normes de confort : ascenseurs, cuisines ouvertes sur le salon, balcons, amélioration de l’acoustique…
- de nouvelles réglementations : normes environnementales et incendies, accessibilité aux personnes à mobilité réduite…
L'habitat ancien aujourd'hui : quel constat ?
Aujourd’hui, plusieurs problématiques concernent les logements anciens :
- Une mauvaise isolation phonique et thermique qui incite à une surconsommation énergétique et financière pour se chauffer et se climatiser.
- Les mises aux normes parfois obligatoires des bâtiments anciens coûtent cher. Selon leur état et la situation financière des propriétaires, il n’est pas toujours facile de réaliser les travaux.
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Exemple : Les immeubles de la trame Mirès datent du milieu du 19e siècle. Certains d’entre eux sont aujourd’hui vétustes, d’autres ne sont plus adaptés aux modes de vie actuels. Plusieurs d’entre eux ont été ou sont en cours de transformation. |
Plus rarement on peut aussi rencontrer les situations suivantes :
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La préservation de l’habitat ancien n’est donc pas qu’une question d’architecture. C’est aussi et surtout des problématiques sociales, de santé publique… qui supposent une intervention des pouvoirs publics.
Deux types de travaux possible : la réhabilitation ou la rénovation
Face à un bâtiment en mauvais état, il y a généralement deux possibilités : une rénovation ou une réhabilitation. Dans le langage courant on mélange ces deux termes, alors qu'en urbanisme cela renvoie à deux interventions très différentes. Quelle est la différence ?
La rénovation
La rénovation, pour les urbanistes, désigne la démolition totale ou partielle d’un bâtiment puis une reconstruction neuve, aux normes actuelles, répondant à de nouveaux critères.

Le Clary : ici une partie des immeubles d’un îlot de la trame Mirès a été démolie. A la place, une nouvelle résidence a été construite accueillant des logements et bureaux.
La réhabilitation
Dans le cas de la réhabilitation, le bâtiment n’est pas détruit mais transformé et adapté aux normes, besoins et modes de vie. La réhabilitation vise à conserver au maximum le caractère historique et architectural du bâtiment.

Immeubles rue de la République : Construits au 19e siècle, ces immeubles étaient pour la plupart laissés à l’abandon et la rue commerçante désertée. Des travaux de réhabilitation ont permis de remettre aux normes les bâtiments, ravaler la façade.
Dans quel cas faut-il rénover ou réhabiliter un bâtiment ?

Ce choix complexe se fait en fonction de plusieurs paramètres :
- l’état du bâti, sa valeur patrimoniale, son impact sur le fonctionnement urbain,
- la facilité ou non avec laquelle on peut le transformer pour l’adapter aux normes / exigences d’aujourd’hui,
- les conséquences sociales à anticiper (relogements d’habitants, évolution de la sociologie du quartier…),
- le coût à engager
Toutes ces paramètres ne sont pas pensés de façon isolée mais dans une vision d’ensemble sur le quartier. Impossible d’agir sur tous les bâtiments en même temps, les pouvoirs publics et l’aménageur font donc des choix en fonction des priorités d’action.
Le cas particulier de l’arrêté de péril
L'arrêté de péril, la démolition, l'expropriation et le relogement sont utilisés lorsque la situation devient critique et qu'elle peut porter atteinte à la sécurité des habitants.
Et sur Euroméditerranée, comment cela fonctionne ?
Un lourd héritageSur Euroméditerranée, les quartiers d'habitat ancien se situent à l'arrière de la façade maritime. Dans les années 1970, la dégradation des bâtiments s’accélère quand les ouvriers quittent leurs logements suite à la délocalisation de l’activité portuaire à Fos-sur-Mer. |
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Faciliter la réalisation des travaux par les propriétaires
Pour résorber l’habitat dégradé les pouvoirs publics peuvent mobiliser différents types d’outils, allant du plus incitatif au plus coercitif.
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Dans un premier temps, un diagnostic a révélé l’ampleur de la dégradation des bâtiments sur un vaste territoire et la précarité des habitants. Tous ces éléments ont permis la mise en place d’un premier outil incitatif : l'Opération Programmée d'Amélioration de l'Habitat (OPAH). |
Ce dispositif, piloté par Euroméditerranée, prévoit des aides financières pour les propriétaires qui souhaitent faire des travaux dans leur logement. L'OPAH « Euroméditerranée » initiée en 2001 est reconduite pendant plus de 10 ans. En 2013, un bilan vient mesurer les effets de l'opération sur l'amélioration des immeubles.
Prendre la main
Le bilan a démontré que le nombre de travaux effectués était insuffisant pour résorber l'habitat dégradé. Aussi l'aménageur a-t-il enclenché une autre stratégie : devenir propriétaire des immeubles dégradés pour pouvoir intervenir directement.
Pour pouvoir acquérir les immeubles, il a utilisé le Droit de Préemption Urbain (DPU). Cet outil définit une zone à l'intérieure de laquelle le pouvoir public peut se porter acquéreur en priorité lorsqu'un bien est vendu.
Réhabiliter ou rénover
Une fois propriétaire, Euroméditerranée peut, au cas par cas, faire le choix de rénover ou de réhabiliter.
Quand les immeubles sont occupés, Euroméditerrannée se charge de reloger les locataires. Il apporte une attention particulière à la maîtrise des loyers pour permettre aux habitants qui le souhaitent de rester dans leur quartier.
Pour réaliser les projets, l’aménageur cherche des partenaires car il n’a pas la capacité de le faire seul et surtout il n’a pas vocation à rester propriétaire des immeubles.
- En moyenne la réhabilitation coûte 1800 €/m², donc plus cher que la rénovation (1600 €/m² intégrant les frais de démolition).
- Intervenir dans l’habitat ancien c’est aussi se confronter à des problèmes techniques : parfois les bâtiments se soutiennent les uns les autres. En détruire un peut créer un « effet domino ». L’association de bureaux d’études spécialisés est donc indispensable.
Pour compenser le coût supérieur de ces opérations de réhabilitation et leurs difficultés techniques (qui engendrent aussi un temps allongé de l’opération), un cofinancement de l'ANRU ou de l'ANAH peut aider à convaincre des bailleurs sociaux ou promoteurs de se lancer dans ce type d’opération.
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Par exemple sur l’îlot Bon Pasteur, Euroméditerranée réalise l'opération avec un bailleur social unique afin de faciliter la gestion du projet et son équilibre financier. Au final les logements sont soit remis en état (>réhabilitation), soit démolis - entièrement ou partiellement - (>rénovation) pour créer de nouveaux logements qui appartiendront à des bailleurs ou à des promoteurs. |
Intervenir sur l’habitat ancien est un travail long, de dentelle, qui se décide immeuble par immeuble.
Conclusion
Les enjeux d’intervention dans l’habitat ancien sont complexes et le choix entre réhabilitation ou reconstruction peut être très difficile.
Refaire la ville sur la ville en cherchant à préserver l'habitat ancien est donc un travail sur le long terme qui nécessite de mettre en place des politiques publiques avant que la situation ne se dégrade.
> Pour aller plus loin
Participez à un Atelier de découverte urbaine sur ce thème, à titre individuel ou avec votre classe, ou un groupe constitué d'au moins 15 personnes.